SUD-KIVU : Cinq députés demandent le départ du gouverneur Théo Ngwabidje
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Par la Nouvelle Afrique
Les désordres qui prévalent depuis des mois au sein de l’ensemble des organes délibérants de nos provinces, méritent une analyse approfondie. Et il ne suffit pas seulement de le reconnaître ou de le dire, mais aussi et surtout de prendre des dispositions nécessaires pour y mettre un terme.
Il est en effet insupportable que des députés provinciaux qui devraient accompagner les exécutifs provinciaux dans l’accomplissement de leurs missions, soient les premiers à leur mettre des bâtons dans les pieds, les empêchant ainsi de travailler dans la sérénité.
Et dans leur forfaiture, l’on constate que les tireurs de ficelles sont tapis dans l’ombre à Kinshasa, espérant par leurs actes ignobles, venir un jour occuper les places qui seront laissées vides par les gouverneurs qu’ils s’emploient à déstabiliser. L’on peut le dire aujourd’hui en ce qui concerne la province du Sud-Kivu où cinq députés provinciaux, toujours le même groupe ont déposé mercredi 23 décembre au bureau de l’Assemblée provinciale, une motion de défiance contre le gouverneur de province Théo Ngwabidje.
Ces députés sont Me Georges Musongela, Dr. Homer Bulakali, Frédéric Batandi, Augustin Bulimuntu, appartenant tous à l’Union pour la nation congolaise -UNC -, le parti cher à Vital Kamerhe, sans oublier Bashengezi Mirindi portant le sobriquet d’Agefreco.
Ces élus condamnent la mégestion de l’exécutif provincial.
Ils citent dans leur texte notamment la question de réhabilitation de la route place Mulamba-Ruzizi I, l’état de délabrement très avancé des routes des territoires d’Uvira, Fizi, Mwenga… Ils affirment détenir des éléments de preuves sur des probables détournements des fonds de la province. L’autre question soulevée par ces députés se rapporte aux aides du gouvernement central aux sinistrés de Nyamugo à Bakavu et Kamituga à Mwenga.
Selon eux, un montant d’environ 1 millions de dollars US aurait été débloqué par le gouvernement central pour assister les sinistrés de Nyamugo, mais cette assistance ne serait jamais arrivée à destination. Même situation pour les sinistrés de Kamituga à Mwenga qui attendraient, à en croire ces députés frondeurs, la reconstruction de leurs maisons, pourtant l’argent aurait été débloqué depuis le début de l’année 2020.
Ils ont demandé au président de l’organe délibérant de programmer cette motion endéans 48 heures afin que le gouverneur de province vienne répondre aux préoccupations de la population exprimées par les députés provinciaux du Sud-Kivu.
Violation du règlement intérieurInterpeller un gouverneur de province, ou encore un ministre provincial sur sa gestion est une bonne chose. Mais, là où le bât blesse, c’est lorsque cette interpellation viole les dispositions légales du Règlement intérieur de l’Assemblée provinciale. Cela ne se passe pas seulement dans le Sud-Kivu, mais également dans l’ensemble des provinces du pays. Partout, les gouverneurs et leurs ministres ne dorment plus tranquillement sur leurs deux oreillers.
Ils sont constamment sur le qui-vive, ne sachant à quel moment des députés qui n’ont jamais voulu s’imprégner du Règlement intérieur, pourraient surgir à l’incitation de leurs maîtres à penser résidant à Kinshasa pour déposer une motion de défiance à leur encontre.
Et comme au Sud-Kivu, les griefs sont les mêmes partout : détournements des biens de l’Etat.Un complot qui date de longtempsPour ce qui est du gouverneur Théo Ngwabidje Kasi, les observateurs conviennent maintenant que la motion de défiance déposée par ces cinq députés provinciaux, n’est que l'aboutissement d'un vaste complot ourdi depuis plusieurs mois contre lui. Et l’on sait même que depuis 2007, le modus operandi n’a pas changé: un groupe de députés provinciaux se réunissent nuitamment quelque part, affirmant agir au nom d’autres députés provinciaux qui, eux, ne sont au courant de rien du tout.
En définitive, l’on découvre très vite que les commanditaires originaires du Sud-Kivu vivant à Kinshasa sont ceux qui dirigent l'opération. Ces députés n’ont jamais cessé de jurer d'obtenir le départ du chef de l'exécutif provincial. Ils se déploient sur tous les terrains, espérant voir l’un d’eux ou leurs commanditaires occuper le moment venu les fonctions de gouverneur de province.
Mais, n’ayant pas réussi à empêcher le vote du budget 2021 de la province par la majorité des députés, ils ont alors décidé de passer à une autre étape, celle de la motion de défiance.
A propos du détournement de l'aide humanitaire destinée aux personnes sinistrées après les incendies survenus à Kamituga au début de cette année, l’opinion se rappelle que lors de sa mission d'itinérance en octobre dernier à Kamituga, le gouverneur avait reçu les sinistrés et les avait rassurés qu'une fois la réhabilitation de la route terminée sur le tronçon Kasika-Mwenga truffé de bourbiers, l'aide humanitaire leur parviendra.
D’ailleurs, l’Office des routes a annoncé la fin de ces travaux en janvier 2021. Bien plus, l’on ne peut exiger du chef de l’exécutif provincial d'assurer la sécurité de la province, alors qu'il ne reçoit rien en guise de rétrocession depuis bientôt 10 mois, et que l'économie de la province a été plombée par la crise sanitaire dont on ignore la fin.
Les députés provinciaux devraient être les premiers à fustiger cette situation qui les prive de leurs émoluments pendant presqu'une année. De même, l’on ne peut accuser de mégestion un gouverneur qui, malgré les contraintes budgétaires et socioéconomiques, met chaque mois une dotation à la disposition de l'assemblée provinciale. Encore que si toutes ces accusations étaient fondées, l’on devrait, comme cela se fait à l’Assemblée nationale, adresser d’abord une question orale avec débat au gouverneur de province.
Si les explications fournies par lui ne parvenaient pas à convaincre les députés, c’est alors que l’auteur de la question orale peut la transformer en une motion de défiance. Y passer directement n’est pas conforme au règlement intérieur.
En fin de compte, le VPM en charge de l’Intérieur, sécurité et affaires coutumières, qui a convoqué à Kinshasa tous les gouverneurs de province, invitera le chef de l’Etat, Félix Tshisekedi, à tirer les oreilles des présidents des assemblées provinciales qui seront réunies dans la capitale juste après la Conférence des gouverneurs. Et dans le cadre de la réforme de la loi électorale, il serait souhaitable que le président de la République fasse diligence pour le changement du mode d'élection des gouverneurs. Ou encore, que le chef de l’Etat opte finalement, comme cela avait été mentionné dans des mémorandums lui remis par les personnalités consultées, à l’ancien système de la territoriale des non-originaires.
Dans le cas contraire, ce sont pratiquement toutes les provinces qui risquent d’être déstabilisées suite à la déchéance de leurs gouverneurs.
La Nouvelle Afrique